Consciente des changements climatiques et sensible à la question de la résilience alimentaire, Esther Demaegdt s’engage chaque jour dans l’association Triticum de Rouen. Œuvrant pour le maintien de la biodiversité cultivée, Triticum (blé en latin) a créé une maison des semences paysannes et citoyennes qui organise des ateliers d’agriculture et travaille au développement de filières locales professionnelles. Bénévole puis salariée de l’association, Esther nous partage son parcours professionnel engagé et sa vision de l’audace.
Bénévole, auto-entrepreneure et salariée
Comment vous êtes-vous lancée dans votre projet associatif ?
E.D : Je ne suis pas la créatrice de l’association. Je suis arrivée l’an dernier dans le projet. Tout a débuté en adhérant à l’association. L’objet de Triticum m’a tout de suite parlé. J’ai eu l’occasion de contribuer aux moissons participatives et j’y ai fait de nombreuses rencontres.
A côté de cet engagement, je travaillais dans le secteur alimentaire et bio. En effet, j’ai créé mon autoentreprise « Les ateliers d’Esther » qui propose des ateliers de cuisine permettant d’appréhender de nouveaux ingrédients, des techniques culinaires et les bienfaits d’une cuisine saine. Quelques temps après, l’association Triticum m’a proposé d’accompagner la mise en place d’un projet. J’ai donc commencé par des prestations via mon autoentreprise puis je suis devenue salariée de l’association.
Quels projets avez-vous accompagnés ?
E.D : L’association Triticum est une maison des semences. Elle a pour but de multiplier des variétés anciennes pour les proposer aux agriculteurs normands. Ceux-ci sont accompagnés pour pouvoir cultiver ces céréales adaptées au terroir normand tout en étant rentable. En 2020 il a fallu créer un groupe de professionnels autour de ces semences : agriculteurs mais aussi transformateurs (meuniers, artisans boulangers, artisans brasseurs…)
Quand on sait qu’en 2020, les agriculteurs céréaliers normands ont été obligés pour la première fois d’irriguer, cela pose la question du dérèglement climatique. Avec plus d’aléas météorologiques, il est nécessaire de s’orienter vers des céréales qui s’adaptent mieux à ces changements.
L’association cogère désormais la ferme des Bruyères. Portée par la Métropole Rouen Normandie, cette ferme citoyenne et urbaine a notamment pour objectif d’inviter les locaux à remettre les mains dans la terre en éduquant à la nature et à la nourriture, en sensibilisant aux enjeux écologiques et agricoles et en accompagnant les projets d’agriculture urbaine. Depuis mon arrivée, j’ai eu le plaisir de traiter plusieurs projets. Mon objectif est de vulgariser des connaissances autour de l’agriculture, des semences paysannes et des filières afin de les rendre accessibles à tous les publics par des ateliers et des formations.
Comment se lance-t-on dans un tel défi ? Quel a été votre déclic ?
E.D : En premier lieu j’adore manger et cuisiner. Les questions du zéro déchet et de l’impact environnemental de l’aliment me sont très rapidement venues. Déjà quand j’étais étudiante, j’achetais mes fruits et légumes dans une A.M.A.P. (Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne). J’ai toujours eu conscience que beaucoup d’aliments venaient de loin et que très peu de gens en étaient conscients. Par contre, je n’avais presque aucune connaissance de la manière de les cultiver. Mes parents ne sont pas du tout du métier. Mes premiers pas dans l’association sont dus à ma curiosité sur la nature qui m’environnait.
Quelles difficultés avez-vous rencontrées dans votre projet ? Comment avez-vous réussi à les dépasser ?
E.D : Je ne pense pas être la seule mais la COVID 19 a complexifié mon quotidien. Ce sont les activités de mon autoentreprise qui ont été directement touchées. C’est également vrai pour l’association Triticum, il a fallu très régulièrement modifier l’agenda des animations et les thématiques de celle-ci pour s’adapter. Par exemple en avril, il était impossible de recevoir les publics scolaires et donc nous nous sommes orientés plutôt vers les familles.
Comment ces projets sont accompagnés ?
E.D : L’association Triticum est notamment accompagnée par l’ADRESS Normandie pour sa structuration économique. Cette structure permet à l’association de grandir, d’organiser ses nouvelles actions et de développer de nouveaux projets comme la ferme urbaine des Bruyères. Nous avons également des bénévoles très compétents au sein de l’association, c’est une chance !
« Je crois beaucoup dans le collectif »
Avez-vous un secret ? Quel est votre leitmotiv ou une citation qui vous inspire ?
E.D : Je crois beaucoup dans le collectif. Mon activité professionnelle dans le milieu associatif et le modèle économique coopératif en sont des preuves. J’aime beaucoup le proverbe « seul on va plus vite, ensemble on va plus loin ».
Quelle a été votre plus grosse réussite ?
E.D : C’est une question difficile mais je suis fière d’avoir un travail qui est dans le prolongement de mes valeurs. J’ai à cœur de faire en sorte que mes activités professionnelles soient une continuité de mon état esprit. Cela me permet d’appliquer au quotidien mes principes de vie. Je vis et je travaille dans le même état esprit.
Quelle est votre définition de l’audace ?
E.D : Je dirais que c’est d’avoir le courage d’aller où l’on a envie d’aller. Il ne faut pas avoir peur, ne pas se fixer de limites ou de barrières.
Auriez-vous un conseil pour les audacieux normands ?
E.D : Ce qui fait peur dans les nouveaux projets, c’est d’être bousculé dans son confort. En réalité, c’est ça qui est vivifiant. Parfois, pour se lancer, il ne faut pas avoir peur de quitter un travail, baisser son niveau de vie ou rejoindre un nouveau secteur d’activité. Il est important de se faire confiance, nous avons tous une grande capacité d’adaptation que nous ne connaissons pas toujours !
Premier mécène de l’Economie Sociale et Solidaire en Normandie, la Caisse d’Epargne Normandie au travers de son fonds de dotation pour l’Initiative Solidaire accompagne l’ADRESS Normandie. Présente au conseil d’administration de ce collectif d’acteurs engagés pour le développement des entreprises sociales, elle permet à des entreprises et des associations comme celle d’Esther Demaegdt de mettre leur efficacité économique au service de l’intérêt général des normands.
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